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    Le truc usant, surtout en 6è mais de plus en plus souvent jusqu'en 3è aussi, ce sont les questions ... comment dire ... "idiotes". Je reste indulgente avec les 6è pendant au moins les deux premiers mois de l'année scolaire. Ensuite, je rembarre. Idem avec des erreurs grossières sur des phrases très simples ou des éléments culturels qui devaient être acquis (surtout en 4è et 3è).


    « Les devoirs, c’est pour quand? »           
    « Pour le 25 Décembre … »

     

    *****

    « J’ai plus de place, je tourne la feuille? »    
    « Non, continue sur la table. »

     

    *****

    « En Anglais? »      
    « M’enfin … non! En russe! »

     

    *****

    « Wow, ça m’casse les couilles, ce réglement de merde! »
    « P’tain, vous m’cassez les couilles avec ça! »
    « Ouais, ça m’casse les couilles, votre truc! »
    « C’est casse-couilles! »    
    « Euh, dis-moi, Fernand, il t’en reste? Nan mais, je ne voudrais pas être responsable d’un éventuel problème médical, genre stérilité ou impuissance, … un jour … ça m’embêterait. »
    « Vous voulez voir? »      
    « Je t’en prie, je serais rassurée … »

    [situation qui s'est produite tout de même deux fois en 18 ans d'enseignement, une première fois en ZEP, l'autre fois dans mon établissement actuel, et bien sûr ... j'ai eu le dernier mot à chaque fois ]

     

    *****

    « I French. »      
    « Me Tarzan, you Jane. »

     

    *****

    « I am a cat. »      
    « Really? » (dis-je en commençant à mimer un chat qui crache)

     

    *****

    « I like horse-reading. »   
    « Tu vas faire fortune! »

     

    *****

    « Je comprends pas .. mais si on met le mot dans l’autre sens, ça fait comme à la télé, c’est … parce que là, vous avez dit … euh … eh bien, le sujet, là … il se conjugue comme « can » mais lui on lui fait rien alors pourquoi l’adjectif il bouge? »

    « Je comprends ta détresse. »

     

    *****

    « Capitale de l’Angleterre?«     -     « New York! »

    « Citez-moi des villes américaines.«      -     « La Californie! »  /  « Londres! »  /  « Florida! » 

     

    *****

    « Madame, le punissez pas, c’est moi qui parlais. »      
    « Tu parles tout seul? Tu devrais consulter … »

    [et quand je finis par punir, je punis les deux, car celui qui écoute est complice, en encourageant l'autre à babiller]

     

    *****

    « What colour is your car? »       
    « She is blue. »

    « Ah … mais c’est elle que j’ai croisée au Super U dans le rayon fromages l’autre jour!! » (ou autre réplique conférant un caractère humain à ladite voiture)

     

    *****

    (au tableau) 
    « J’écris là? »       
    « Non, par terre. »

     

    Bon, vous l’aurez compris, ce ne sont que des flash, des instantanés très brefs, où mes réponses peuvent paraître sont lapidaires, voire méchantes, sans appel … Le truc, c'est qu'il y en a 10 par classe chaque jour, le seuil de tolérance, après plusieurs mois et des tentatives d'indifférence, baisse dangereusement.

    Ce qui n'enlève rien à la bienveillance qui m'anime 98% du temps (il m'arrive d'avoir des colères homériques, j'en reparlerai)

     

     

     11 décembre 2012 | Quitter l'enseignement ? | Commenter


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    Quand j’ai la pêche, de l’énergie à revendre, en classe, ça dépote. Je ne cesse de glousser, j’ai un sourire-banane dès que l’occasion se présente, je ne les lâche pas d’une semelle, j’invente des trucs en cours de route, des dizaines d’idées m’assaillent. Et sans que ça parte dans tous les sens (la description ci-dessus pourrait le laisser craindre), on s’amuse.
    Le retour est immédiat. Des élèves qui sourient pendant une explication de grammaire sur le présent simple ; d’autres qui viennent me voir en fin d’heure pour me dire combien ils sont contents d’avoir une prof qui s’amuse dans son métier et les amuse du même coup en apprenant; des élèves qui se laissent aller à des jeux de mots ou de la fantaisie pendant le cours …

    C’est chiant … C’est pas racontable du tout, en fait! Un jour, il faudrait que l’on se fasse filmer pendant que j’explique le présent simple, la prononciation de la terminaison en -ed du prétérit (séance d’abdominaux), que je donne des astuces de traduction … Je fonctionne beaucoup avec le visuel et le corps.

    Bon, je vais essayer.

    Par exemple, pour expliquer que le présent simple (par opposition au présent en BE+V-ing) s’utilise pour parler de « généralités », de choses qui se vérifient, se voient, se vivent dans un temps étiré et indéterminé, j’écarte les bras pour figurer la ligne du temps. Mon bras droit figure le passé, ma tronche représente le présent immédiat, et mon bras gauche le futur. J’explique que le verbe LOVE ne peut s’utiliser qu’au présent simple (à de rares exceptions près) parce que je LOVE le chocolat depuis qu’on nous a présentés (je remue la main droite et rajoute à voix basse : « Le coup de foudre!! »), que c’est toujours vrai au moment où je parle, là … (et je mets la tranche de ma main devant la bouche en parlant), et que ce sera vrai encore longtemps (je remue les doigts de la main gauche en expliquant que seule une crise de foie aiguë pourrait mettre un terme à cette passion). Puis j’effectue un mouvement de balancier avec les deux bras pour montrer que ce « présent » est très « large ». Je refais la zouave avec des exemples comme « Le soleil se lève à l’Est », « Les Français mangent des escargots », « En période scolaire, je me lève à 6h30 tous les matins » etc … Ma ligne du temps va ainsi de quelques mois à plusieurs milliards d’années (mais je n’ai pas le bras long pour autant).

    the giggling teacher *

    Par exemple, pour qu’ils se souviennent de répondre correctement aux « Yes-No questions » (les anglophones ne se contentent pas de dire « Yes » ou « No », ils reprennent le sujet et l’auxiliaire, galère), j’écarte (encore) les bras. Tout en prononçant un beau « Has your mother got blue eyes? », ma main droite en l’air effectue des rotations comme si je tenais un objet rond. Et tandis que je donne la réponse : « Yes, she has« , ma main gauche fait mine de « piquer » le « has » et de le ramener à gauche, en l’air. Et je conclue avec les deux mains arrondies en l’air en répétant : « Has / has ». Et je continue avec des « Can » et des « Do » et des « Will » … J'me fais l'effet d'une GO au Club Med ...

    Par exemple, pour qu’ils mémorisent le mot « spring » (printemps / mot anglais qu’ils ont tendance à oublier le plus dans les 4 saisons), je leur raconte que ce mot a différentes significations. En tant que verbe, il veut dire « sauter, jaillir » et j’illustre avec un sonore « zboiiing » tout en sautillant dans la classe. En tant que nom, il peut vouloir dire « source » (zboiing et petits sautillements), mais aussi « ressort de matelas » (zboiing et petits sauts de la main). Puis je leur demande pourquoi il s’utilise pour désigner le printemps. Hey … ça ne prend pas trois dizièmes de seconde ; les réponses fusent : les fleurs jaillissent, les arbres se couvrent de vert, on a envie de sauter partout, zboiing, zboiiing, zboiiing!!! Là, j'ai carrément l'impression de sortir tout droit des "Bronzés" ...

    J'ai souvenir d'une heure particulièrement délicieuse il y a quelques mois, sans démonstrations corporelles particulières, avec des 4è. Entre jeux de mots rigolos impliquant les deux langues, fantaisies vocales d’un élève, réparties cinglantes de ma part, attaques en piqué sur l’auxiliaire DID, début de fou rire suite à une tentative d’humour d’une élève (qui a été la première à rire de sa blague vaseuse), et un exercice de traduction qui marchait de mieux en mieux, je suis ressortie toute joyeuse et sautillante.

    zboiiing zboiiing

    Aucune étude scientifique sérieuse n’ayant jamais été menée, et parce que mon manque naturel de confiance en moi me force à la modestie, je ne suis pas en mesure de dire si mes « méthodes » fonctionnent mieux que d’autres.
    A mon avis, non, et les évaluations le montrent.
    En revanche … je m’amuse quand je travaille, et la plupart des gamins aussi.

    Je dis « la plupart », parce que ... on ne peut pas plaire à tout le monde.

     

    * la prof qui glousse

     

     

    9 décembre 2012 | Quitter l'enseignement ? | Commenter


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